Les « programmes d’accompagnement CEE », un dispositif fourre-tout difficile à évaluer

2024-06-21     lemonde.fr HaiPress

Bruno Le Maire (au centre),ministre de l'économie,à Paris,le 12 juin 2024. LAURENCE GEAI/MYOP POUR « LE MONDE » Des « animations ludiques » sur les aires d’autoroute,un grand jeu-concours pour gagner une voiture électrique ou un gonfleur de pneus… En 2021,le distributeur d’essence Dyneff et la société autoroutière APPR ont sorti le grand jeu pour sensibiliser les automobilistes à « l’écoconduite ». Le projet Sensibilisation pour le transport économe en énergie et responsable (Steer) a été soutenu par le ministère de l’économie et a reçu 3,7 millions d’euros de subventions,car l’objectif était ambitieux : les 185 000 automobilistes sensibilisés devaient économiser 740 gigawattheures (GWh) – l’énergie nécessaire à une voiture thermique pour parcourir 120 millions de kilomètres.

La promesse a-t-elle été tenue ? Impossible de le savoir,car l’administration ne quantifie pas l’impact réel des projets comme Steer,financés dans le cadre d’un dispositif de soutien public méconnu,mais généreux : les programmes d’accompagnement des certificats d’économie d’énergie (CEE).

Depuis 2012,123 projets publics ou privés ont été sélectionnés par le ministère de l’économie pour bénéficier de la manne des CEE,un mécanisme de pollueur-payeur qui contraint les fournisseurs d’énergie à financer des actions de sobriété énergétique. Selon les calculs du Monde,près de 3 milliards d’euros issus de cette « parataxe » ont été déboursés en douze ans,avec un effet très incertain.

2,8 milliards d'euros en douze ans pour financer les programmes CEE

Budget théorique cumulé des programmes d'accompagnement CEE par année de lancement (le budget réel peut être inférieur si le programme est révisé ou si le porteur ne trouve pas de financeurs).


Source : Le Monde (via la Direction générale de l'énergie et du climat)

Des économies théoriques questionnables

Les CEE sont censés financer des actions en fonction de l’énergie économisée,avec un barème de 7 euros par mégawattheure évité. Mais les programmes d’accompagnement reposent souvent sur l’innovation,la sensibilisation ou la formation – des projets dont l’impact est difficile à mesurer. Les objectifs d’économie d’énergie sont parfois très approximatifs,alors qu’ils servent de référence à l’administration pour établir le montant des subventions à allouer.

Ainsi,le ministère de l’économie a validé en 2022 un programme de 7 millions d’euros proposé par la fondation AI Cargo,qui promettait de faire économiser 1 000 GWh aux entreprises du transport et de la logistique en les sensibilisant au « report modal ferroviaire et fluvial du transport de marchandises ». Le groupe d’écoles d’ingénieurs CESI a obtenu 8 millions d’euros pour « comprendre et optimiser la mobilité économe » des étudiants grâce à des programmes de recherche,des « actions de terrain » et des expérimentations dans « six campus pilotes ». L’énergéticien Engie a reçu 10,4 millions d’euros pour « sensibiliser et conseiller » 278 000 ménages sur les « écogestes durables » lors de l’entretien de leur chaudière.

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